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Lis-Tes-Râtures
La forme poétique
--> Versification
La poésie classique a longtemps obéi à des contraintes de composition. Voici quelques rappels et une occasion de faire le point sur quelques techniques de versification, s'exercer et écrire...

Versification / Métrique.

 

Le vers français : C’est une ligne rythmique qui se caractérise par le nombre de syllabes qu’elle contient.

 Certains vers, en fonction de leur longueur reçoivent une dénomination précise. De une à douze syllabes, tous les mètres (tous les types de vers) sont possibles :

 

— le vers d’une syllabe est un monosyllabe,

— le vers de deux syllabes est un dissyllabe,

— le vers de trois syllabes est un trisyllabe,

— le vers de quatre syllabes est un tétrasyllabe,

— les vers de cinq et de six syllabes ne portent pas de nom particulier,

— le vers de sept syllabes est un heptasyllabe,

— le vers de huit syllabes est un octosyllabe,

— le vers de neuf syllabes est un ennéasyllabe,

— le vers de dix syllabes est un décasyllabe,

— le vers de onze syllabes est un hendécasyllabe,

— le vers de douze syllabes est un alexandrin.

 

 On distingue aussi les vers pairs (ceux qui comportent un nombre de syllabes multiple de 2) et les vers impairs (ceux dont le nombre de syllabes est 1, 3, 5, 7, 9 ou 11)

 Selon le thème abordé par le poète, tel ou tel type de vers sera retenu (l’alexandrin, par exemple, peut se prêter à des sujets solennels, majestueux)

 

 

 

a. Voici des extraits de la première partie du  poème de Hugo « Les Djinns » :

 

 Murs, ville,

 Et port,

 Asile

 De mort,

 Mer grise

 Où brise

 La brise,

 Tout dort.

 

 Dans la plaine

 Naît un bruit.

 C’est l’haleine

 De la nuit.

 Elle brame

Comme une âme

Qu’une flamme

 Toujours suit !

 

  La voix plus haute

 Semble un grelot.

 D’un nain qui saute

 C’est le galop.

 Il fuit, s’élance,

 Puis en cadence

 Sur un pied danse

 Au bout d’un flot.

 

 La rumeur approche

 L’écho la redit.

 C’est comme la cloche

  D’un couvent maudit ;

 Comme un bruit de foule,

 Qui tonne et qui roule

 Et tantôt s’écroule,

 Et tantôt grandit.

 

  Dieu ! la voix sépulcrale

 Des Djinns ! … Quel bruit ils font !

 Fuyons sous la spirale

 De l’escalier profond.

 Déjà s’éteint ma lampe,

 Et l’ombre de la rampe,

 Qui le long du mur rampe,

 Monte jusqu’au plafond.

 

 C’est l’essaim des Djinns qui passe,

 Et tourbillonne en sifflant !

 Les ifs, que leur vol fracasse,

 Craquent comme un pin brûlant.

 Leur troupeau, lourd et rapide,

 Volant dans l’espace vide,

 Semble un nuage livide

 Qui porte un éclair au flanc.

 

 Ils sont tout près ! – Tenons fermée

 Cette salle, où nous les narguons.

 Quel bruit dehors ! Hideuse armée

 De vampires et de dragons !

 La poutre du toit descellée

 Ploie ainsi qu’une herbe mouillée,

 Et la vieille porte rouillée

 Tremble à déraciner ses gonds !

 

 Cris de l’enfer !voix qui hurle et qui pleure !

 L’horrible essaim, poussé par l’aquilon,

 Sans doute, ô ciel ! s’abat sur ma demeure.

 Le mur fléchit sous le noir bataillon.

 La maison crie et chancelle penchée,

 Et l’on dirait que, du sol arrachée,

 Ainsi qu’il chasse une feuille séchée,

 Le vent la roule avec leur tourbillon. !

 

 Le poète joue avec virtuosité sur des longueurs de vers très variées et met la forme au service du sens : les stophes croissantes de son poème donnent le sentiment au lecteur d’entendre de plus en plus intensément l’approche des Djinns. Par la suite, le poème ira décroissant (desalexandrins jusqu’aux dissylabes) pour matérialiser l’éloignement progressif des Djinns jusqu’au silence.

 

b. Voici un autre poème bâti sur le même schéma : « Poème élastique » de Carl Norac.

 

 Je

 T’écris

  Un poème

 Qui va grandir

 S’allonger d’un pied

 A chaque vers tracé

 Sans plus jamais s’arrêter

 Jusqu’à remplir tout l’Univers …

 (Veux-tu m’aider à le rétrécir ?)

 
 
Vous pouvez vous amuser à continuer le poème en tenant compte des exigences du rythme :

 

 



 

Quelques particularités à l’intérieur du vers :

  1. Le problème de la voyelle « e » :

 -  Lorsqu’il est en fin de vers, le « e » ne compte pas : « poi/vrez/ et/ puis/ met/tez/ les/ voil(e)s. » (R. Queneau)

- Lorsque le « e » est à l’intérieur du vers, s’il est placé avant une autre voyelle, il ne compte pas : « Je/ vis/ à/ l’ho/ri/zon/ sur/gir/ la/ lu/n(e) im/ mens(e). » (V. Hugo)

- Lorsque le « e » est à l’intérieur du vers, s’il est placé avant une consonne, il compte : « Moi/ j’as/sem/ble/ des/ mots. » (E. Guillevic)

 

Dans les vers suivants, mettez le « e » entre parenthèses, s’il ne compte pas :

 

 La lune (V. Hugo)

 

- Jeanne songeait, sur l’herbe assise, grave et rose ;

- Je m’approchai : - Dis-moi si tu veux quelque chose,

- Jeanne ? – car j’obéis à ces charmants amours,

- Je les guette, et je cherche à comprendre toujours

- Tout ce qui peut passer par ces divines têtes.

- Jeanne m’a répondu : - Je voudrai voir des bêtes.

- Alors je lui montrai dans l’herbe une fourmi.

- Vois ! Mais Jeanne ne fut contente qu’à demi.

- Non, les bêtes, c’est gros, me dit-elle.

 

  1. Le découpage des vers :

- un vers peut être divisé en deux hémistiches (en deux séquences). Ces hémistiches sont séparés par une coupe appelée césure.

Exemple : « Jeanne m’a répondu : // - Je voudrais voir des bêtes. » 

  < 1° hémistiche > césure < 2° hémistiche  >

 

- parfois un vers se continue, en partie (rejet) ou en totalité (enjambement) sur le vers suivant avec ralentissement du rythme :

 

Exemples : Petit Poucet rêveur, j’égrenais dans ma course

 Des rimes. Mon auberge était à la Grande Ourse. (Rimbaud)

   < Rejet  >

  Ils sont tout prêts ! - Tenons fermée

 Cette salle, où nous les narguons.

 < Enjambement >

 

 Marquez au moyen de deux barres obliques les césures dans les vers suivants :

 

 Les Chats (Baudelaire)

 

 Les amoureux fervents et les savants austères

 Aiment également, dans leur mûre saison,

 Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,

  Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires.

 

 Les Hiboux (Baudelaire)

 

 Sous les ifs noirs qui les abritent,

 Les hiboux se tiennent rangés …

 

 Je vous envoie un bouquet (Ronsard)

 

 Le temps s’en va, le temps s’en va, ma Dame,

 Las ! le temps non, mais nous nous en allons,

 Et tôt serons étendus sous la lame,

 

 Et des amours, desquelles nous parlons,

  Quand serons morts, n’en sera plus nouvelle :

 Pour c’aimez-moi, cependant qu’êtes belle.

 

 Réécrivez les rejets et les enjambements en caractères gras :

   

 La curée (Auguste Barbier)

 

 (…) Toute la meute, alors, comme une vague immense,

 Bondit ; alors chaque mâtin

 Hurle en signe de joie, et prépare d’avance

 Ses larges crocs pour le festin.

 

  L’invitation au voyage (Baudelaire)

 

 Mon enfant, ma sœur,

 Songe à la douceur

 D’aller là-bas vivre ensemble !

 

 Le dormeur du val (Rimbaud)

 

  C’est un trou de verdure, où chante une rivière

 Accrochant follement aux herbes des haillons

 D’argent ; où le soleil de la montagne fière,

 Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.

 

 Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,

 Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,

 Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,

 Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

 

 Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme

 Sourirait un enfant malade, il fait un somme :

 Nature, berce-le chaudement : il a froid.

 

 Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;

 Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine

 Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

 

Le regroupement de vers :

  1. La strophe : c’est un ensemble de vers regroupés sous la forme d’un bloc bien délimité. Il existe des strophes de deux vers (distique) de trois vers (tercet) de quatre vers (quatrain) de cinq, six, voire douze vers.
  2. Généralement une strophe fait partie d’un ensemble plus vaste, le poème.
  3. Il existe des poèmes à vers libres dans lesquels les vers peuvent avoir des longueurs différentes, rimer ou non les uns avec les autres ; dans ce genre poétique le poète se permet un grand nombre de libertés volontaires.
  4. Inversement on rencontre aussi des poèmes à formes fixes qui suivent un schéma préétabli, toujours identique.

Voici quelques poèmes à formes fixes :

 

Rondeau : genre fixe, qui, sous sa forme classique, comprend treize vers construits sur deux rimes, l’une employée huit fois et l’autre cinq, et comportant une strophe de cinq vers, une autre de trois suivie d’un refrain, et une autre de cinq suivie du refrain.

Sonnet : genre fixe, de quatorze vers, soit deux quatrains suivis de deux tercets (en réalité une strophe de six vers qu’on a coutume de présenter avec un blanc typographique). La disposition des rimes est dite régulière lorsqu’elle affecte la forme ABBA-ABBA-CCD-EDE. De fait, il y a beaucoup de liberté chez les auteurs de sonnets (depuis la Pléiade jusqu’au XIXe siècle) par rapport à ces injonctions un peu mécaniques.

Ballade : genre fixe formé de trois couplets et d’un envoi construit sur les mêmes rimes.

Relisez le poème de Rimbaud, « Le dormeur du val ». Donnez le nom de chaque strophe. Déduisez-en le type de poème à formes fixes dont il s’agit.

  

 

Justifiez l’appellation « Ballade » pour le poème suivant.

 

Sur ses larges bras étendus,

La forêt où s’éveille Flore,

A des chapelets de pendus

Que le matin caresse et dore.

Ce bois sombre, où le chêne arbore

Des grappes de fruits inouïs

Même chez le Turc et le More,

C’est le verger du roi Louis.

 

Tous ces pauvres gens morfondus,

Roulant des pensers qu’on ignore,

Dans les tourbillons éperdus

Voltigent, palpitants encore.

Le soleil levant les dévore.

Regardez-les, cieux éblouis,

Danser dans les feux de l’aurore.

C’est le verger du roi Louis.

 

Ces pendus, du diable entendus,

Appellent des pendus encore.

Tandis qu’aux cieux, d’azur tendus,

Où semble luire un météore,

La rosée en l’air s’évapore,

Un essaim d’oiseaux réjouis

Par-dessus leur tête picore.

C’est le verger du roi Louis.

 

 ENVOI

Prince, il est un bois que décore

Un tas de pendus, enfouis

Dans le doux feuillage sonore.

C’est le verger du roi Louis !

 

Théodore de Banville. « Ballade des Pendus ».

 
 

A votre tour, composez un sonnet « Le danseur du bal », une ballade, « La ballade des reclus » ...

 

 

 

 

 

 


Ecrit par Hurricane, le Vendredi 27 Janvier 2006, 01:13 dans la rubrique "Littérature française".


Commentaires :

  L'O
27-01-06
à 10:11

Interessant ce rappel, les souvenirs sont loins... je pratiquerai les autres sujets de cet article plus tard, j'ai commence par mon favori  :-)

  Je

 T’écris

  Un poème

 Qui va grandir

 S’allonger d’un pied

 A chaque vers tracé

 Sans plus jamais s’arrêter

 Jusqu’à remplir tout l’Univers …

 (Veux-tu m’aider à le rétrécir ?)

Descendre vers les montagnes

Survoler l’Ocean bleu

Froler les Baobabs

Puis se faufiler

Tout doucement

Dans ton cœur

Blotti

La


  Hurricane
27-01-06
à 12:23

Re:

Essai réussi ! Et cet exercice est plus diicile qu'il n'y paraît ! Amicalement. :-)

  Bibasse
31-01-06
à 22:58

Re: Re:

Une
syllabe
A tue-tête
Dans un écrin
Au thé bleu de fées
Liant sons de fortune
Comme sonne une clochette
Elle sème, et sangle le verbe
Prise dans l'autre éprise de l'une.
Les syllabes font les alexandrins
Et celles qui s'aiment ont fait bien d'effet
La plus connue d'entre elle a défait bien des coeurs


  Bibasse
31-01-06
à 23:03

Re: Re: Re:

Oups....
Il valait lire :

Une
syllabe
A tue-tête
Dans un écrin
Au thé bleu de fées
Liant les sons en choeurs.
Comme sonne une clochette
Elle sème et sangle le verbe
Prise dans l'autre éprise de l'une.
Les syllabes font les alexandrins
Et celles qui s'aiment ont fait bien d'effet
La plus connue d'entre elle a défait bien des coeurs

  Hurricane
31-01-06
à 23:11

Re: Re: Re: Re:

Belle découverte de ton poème avec toute la gamme des mètres et des allitérations sur le gâteau !
Merci encore !

  Anonyme
04-10-07
à 16:51

Re: Re: Re: Re:

c'est pouri

  Anonyme
20-05-10
à 18:40

Re: Re: Re:

pouver vous me dire si ce poeme elastique a l'envere est valable en cours

quand il pleut je me sens
moins seul de savoir
que le ciel pleure
avec moi
snif

  Anonyme
08-12-12
à 15:35

Re: Re: Re:




non

  Anonyme
28-09-13
à 09:33

Re: Re: Re:

c'est un peut compliquer


  Anonyme
16-12-07
à 15:33

Re:

Hurricane
27-01-06
à 12:23

Re:

Essai réussi ! Et cet exercice est plus diicile qu'il n'y paraît ! Amicalement. :-)

 

On dit Dificile -_- !!


  Anonyme
09-01-12
à 18:23

Re:

non difficile

  Anonyme
19-06-07
à 17:21

Re:

merci maintenant j'ai plus desoin de chercher loin car j'ai trouver la reponse :pp: merci encore

  Anonyme
19-06-07
à 18:27

Re:

merci :: ma madame vas etre etonner

  Anonyme
21-05-14
à 20:46

Re:



Super bien bravo!

  Ecriture
06-05-21
à 12:29

Logiciel d'écriture

Excellent article sur la construction littéraire et les techniques pour bien écrire. Ce blog littéraire est une pépite. La poésie des écrivains HUGO ou BAUDELAIRE n'a aucun secret pour vous. Vive les ressources littéraires et les secrets de ces auteurs français !

  boutiquedecriture
06-05-21
à 12:33

Logiciel d'écriture

Excellent article sur la construction littéraire et les techniques pour bien écrire. Ce blog littéraire est une pépite. Les poèmes des écrivains HUGO ou de BAUDELAIRE n'ont aucun secret pour vous. Vive les ressources littéraires et les secrets de ces auteurs français !